GOYANG | 2018
Résidence du Conseil des Arts et des Lettres du Québec à Séoul
Été 2018
L’artiste tient à remercier le CALQ et le CAC pour leur soutient financier
Évanescence
Vidéo : 4,41 minutes
Montage : Ruth Hutter
75 000 Wons
Installation
Papier réflecteur argenté, pièces de monnaie
Sculpture
Beyond Babel
Acrylique, polystyrène
Installation
Identity crisis
Miroirs dépolis, acier
En arrivant à Séoul, la première vraie fascination est l’omniprésence des monumentales tours d’habitation blanches, leur numérotation et leur uniformité architecturale. En lien avec mes interventions de parasitages sur l’architecture, je décide d’élaborer ma propre tour. Noire, filiforme et impossible, elle parle inévitablement de la métaphore de Babel. La frontière de la langue coréenne est palpable et me rapproche aussi du fameux mythe. Voici le texte qui résumait l’œuvre à l’entrée de la salle :
L'histoire de la tour de Babel, qui explique l'existence de plusieurs langues, illustre le besoin de se comprendre pour réaliser de grands projets et le risque d'échouer si chacun utilise son propre jargon. Cette histoire peut être considérée comme une métaphore du caractère équivoque du langage humain. Cela peut aussi être considéré comme une illustration des dangers de la recherche de connaissances en tant que défi à Dieu. Ici, la métaphore de Babel se mêle à l'image de l'ambition humaine de vouloir construire excessivement, toujours plus, toujours plus haut, en recherche constante du neuf. Les déchets de papier de la sculpture en deviennent une autre et sont conservés sous la tour en référence aux anciens bâtiments détruits et oubliés.
Sous la tour se trouvent donc les rebuts de papiers qui proviennent de mes carreaux d’acrylique. Se sont mes déchets et je veux les mettre en évidence, ça devient une seconde composition issue des restes de la première, ce qui se produit souvent dans ma pratique. Ce tas de papiers roulés est plus instinctif, moins calculé. Finalement, la base de l’immeuble est une série de boites de styromousse, qui évoquent la fragilité et la précarité. Elles se retrouvent partout dans les rues de Goyang, je voulais les introduire dans la salle d’exposition. Hormis les temples et maisons traditionnelles, très peu de bâtiments du dernier siècle ont été conservés à Séoul et en Corée du Sud. Il y a une obsession pour le neuf qui remplace tout ce qui est moindrement vétuste. J’ai réalisé que cette réalité alimente les conversations reliées à l’architecture qui est dictée par la régularité et la conformité.
Je voulais depuis longtemps mettre sur pieds l’installation Évanescence. Après plusieurs tests techniques de projections de lasers et de stroboscopes sur des surfaces couvertes de pigments phosphorescents, il s’avérait plus intéressant de capter les différentes expériences, raison pour laquelle le résultat qui sera présenté à l’exposition sera un montage vidéo de 5 minutes. La trame est assez narrative, voici le texte qui résumait l’œuvre à l’entrée de la salle :
C'est un thème récurrent dans mon travail pour illustrer comment l'homme est inspiré par la nature pour mieux l'exploiter. Cette contradiction est représentée de plusieurs manières. Evanescence s'inspire donc des phénomènes électro-magnétiques des explosions solaires et des aurores boréales pour leurs effets spectaculaires, difficiles à expliquer même par la science. Une imitation maladroite et naïve dans cette vidéo est une autre tentative de l'artiste d'imiter un phénomène naturel en utilisant des moyens artificiels. La lumière est le fil de cette expérience. Il commence comme celui de l'origine du temps, venant du soleil, et se termine par celui maîtrisé par l'homme, avec la bougie. La vitre de l'écran de télévision récupérée et la bougie est également un hommage-clin d’oeil à l'artiste Nam June Païk (Héro Sud-Coréen) qui a longtemps détourné l'usage de la télévision. Le système d'éclairage est ici réduit à sa plus simple expression à l'aide de la bougie, pour exprimer le désir de transformer le dispositif de divertissement en objet de méditation.
Toujours en lien avec le corpus Télescopages, une murale fragmentée en photocopies épinglées qui rappelle le traitement pixellisé de l’image a été produite dans le premier mois de ma résidence. La photographie de cette murale sera la page couverture avant et arrière du livre. L’image a été produite avec une captation du film Télescopages terminé en 2016 qui était aussi présenté dans l’atelier pendant l’exposition.
J’ai complété ma portion de l’exposition collective en salle en poursuivant mes explorations de miroirs dépolis. Le cadre suspendu questionne le rapport d’identité entre soi-même et quelqu’un d’autre, séparés d’une série de miroirs dont l’étain et la peinture de fond ont été altérés.
L'utilisation du miroir et du verre revient souvent dans mon travail pour leur qualité de transmission lumineuse et leurs capacités optiques, mais surtout comme objet de séparation entre deux personnes. Dans le cas de cette exposition, les miroirs reflètent la lumière de la vidéo et agissent en même temps comme un filtre pour la personne qui regarde l’autre en fusionnant avec une image altérée de son identité.
Enfin, à l’aide de mon médium de prédilection, l’installation contextuelle, je voulais parler du côté extrêmement brillant de la Corée du Sud. Je voulais aussi m’inspirer de ce fameux détail architectural du Japonais Tadao Ando que l’on retrouve partout sur les murs de béton. Mais l’installation, qui se meut avec le vent, parle principalement de la subjectivité de la valeur de l’art contemporain. Elle s’intitule d’ailleurs 75 000 Wons, car c’est la somme totale de la monnaie qui pend au bout des languettes argentées.